1/ Au menu du jour : PMI de la zone euro et scénario de la Banque de France
Il y a encore peu de temps (mi-mars), le scénario central de la Banque de France prévoyait encore une croissance de 3,4% pour l’Hexagone en 2022… Les conséquences de l’invasion ukrainienne sont depuis passées par là, et l’institution vient de réviser sensiblement à la baisse son anticipation de croissance pour 2022… et 2023. « Last but not least », la Banque de France a également revu à la hausse ses prévisions d’inflation. Dans le nouveau scénario « central », le PIB ne devrait donc croître que de 2,3% en cette année civile… et de seulement 1,2% en 2023. Rappelons qu’à l’heure de construire son budget 2022, l’exécutif prévoyait encore une croissance de 4% ! Plus globalement, les craintes liées au cycle économique touchent la quasi-totalité de la croissance mondiale. Au-delà des tensions nées de la situation géopolitique sur le Vieux Continent, les observateurs craignent l’impact du resserrement monétaire des principales banques centrales. Les investisseurs s’interrogent plus exactement sur la marge de manœuvre effective des banquiers centraux pour lutter contre l’inflation sans provoquer de ralentissement économique trop marqué. Dans ce contexte, les publications des PMI de ce jeudi en zone euro s’annonçaient particulièrement suivies dans les salles de marché. L’activité des entreprises de la zone euro est tombée en juin à son plus bas niveau en 16 mois sous l’effet de la remontée des taux d’intérêt et des tensions inflationnistes. Surtout, les entreprises manufacturières de la zone euro ont été parmi les moins performantes au cours du mois (le PMI du secteur tombant à 52 points)… soit son plus bas niveau en 22 mois. La production a également diminué pour la première fois en deux ans. L’industrie continue en effet d’être confrontée aux problématiques d’approvisionnement, à la hausse des coûts et à un affaiblissement de la demande de biens lié à l’inflation… Phénomène qui devrait continuer de peser sur l’activité ces prochains trimestres. Si les services résistent davantage, la croissance dans ce secteur d’activité a également fortement ralenti. S&P Global relève sur ce point qu’une flambée des prix a nourri un ralentissement du tourisme… tandis qu’une récente poussée des banques centrales à augmenter les coûts d’emprunt pour contenir l’inflation a pesé sur l’activité bancaire et immobilière. L’indice PMI flash de juin pour la zone euro service est tombé à 52,8 points, son niveau le plus faible depuis janvier. N’en jetez plus ? La hausse aussi rapide que significative des prix des matières premières, en particulier sur le front énergétique, se poursuit. Le Conseil Européen doit d’ailleurs se réunir en cette fin de semaine afin de valider formellement le statut de candidat à l’adhésion de l’Ukraine et de la Moldavie, même si le chemin sera long en l’absence de procédure d’urgence. Une décision forcément susceptible de renforcer l’hostilité de Vladimir Poutine. Des répercussions sur les approvisionnements en gaz en provenance de Russie, déjà sensiblement rabotés, sont à attendre… Nouvelles pénuries et hausse des prix à venir ? Les dirigeants européens semblent craindre chaque jour un peu plus l’hiver prochain… Face au risque de pénurie d’énergie, Berlin et Rome ont d’ores et déjà annoncé la réouverture temporaire des centrales à charbon… en attendant la mise au vert de l’Europe !

 

2/ Green is beautiful !
Face aux risques de pénurie énergétique auquel fait face la zone euro (cf. ci-dessus), la volonté politique d’accélérer la transition énergétique ne peut qu’être renforcée. Non, cette transition ne pourra faire office d’alternative à l’épineux défi de l’hiver prochain… Il sera nécessaire pour nos responsables politiques d’afficher une victoire stratégique à plus long terme dans un contexte potentiellement explosif. Aussi, l’échec du Parlement européen à s’accorder sur la réforme du marché du carbone, que nous évoquions dans notre newsletter du 9 juin 2022 a fait mauvais effet. Seulement quelques semaines après ce premier revers, ce même Parlement est finalement parvenu à un accord ! Pour ce faire, le calendrier de mise en œuvre a été modifié, passant de 2025-35 à… 2027-32 ! Un démarrage plus progressif donc… mais une ambition affirmée d’accélérer le processus par la suite. Dans les faits, les quotas carbones gratuits seront graduellement retirés à partir de 2027… alors que le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières entrera dans le même temps en vigueur. Immeubles de bureaux, transports routiers, transport maritime… nombre de secteurs seraient par ailleurs concernés par « le marché du carbone ». « Seraient », car cette proposition doit encore être ratifiée par les Etats eux-mêmes ! A l’heure où la pérennité de taux de marges élevés pour les entreprises pose question, l’internalisation dans les coûts des entreprises des externalités négatives propres à leurs activités interroge d’autant plus. Une redistribution des cartes s’annonce ! De quoi engendrer une vague d’évasion « climatique » après l’ère de l’évasion fiscale ? Le Parlement semble avoir anticipé ce risque en appliquant les mêmes contraintes aux importations… Nul doute pour autant que de fortes tensions commerciales s’annoncent avec les zones économiques non soumises à ces restrictions. Comment les pays concernés réagiront-ils ? Les exportations du Vieux Continent pourraient in fine faire face à un risque accru de mise en place de droits de douanes, alors même que leurs coûts de fonctionnement sont susceptibles d’augmenter à la suite de cette évolution stratégique.
Si ces évolutions ne manqueront pas de nourrir les tensions inflationnistes liées à l’énergie, elles devraient selon nous augmenter significativement les perspectives économiques des acteurs liés à la transition énergétique. A suivre…

 

Sources : WiseAM, BFM Business, Le Monde, La Tribune, Les Echos, Agence Ecofin, TF1 Info, Marianne
Crédits images : Gettyimages
Achevé de rédiger le 23/06/2022