1/ Quand les valeurs technologiques se réconcilient avec les banquiers centraux…
Une thérapie de couple était probablement nécessaire… Pendant de longues semaines, remontée des taux d’intérêts rimait avec correction des actifs typés « croissance », valeurs technologiques en tête. Rappelons que la longue descente aux enfers jusqu’en territoire négatif des rendements obligataires ces trois dernières décennies avait amené l’investisseur à une recherche d’alternatives aux rendements disparus. Une quête effrénée qui ne fut pas sans conséquences… puisque tous les segments ou valeurs susceptibles d’offrir de la croissance visible se sont payés de plus en plus cher au fur et à mesure que les rendements baissaient. Dans un marché si focalisé sur les tensions inflationnistes et la remontée des taux américains, les valeurs « croissance » ont donc été durement sanctionnées cette année, qu’elles offrent ou non des perspectives de croissance des résultats attractives… La tendance est-elle en train de s’inverser ? Alors que la Banque centrale du pays de l’Oncle Sam a voté cette semaine une nouvelle hausse des taux d’une ampleur significative (mais néanmoins largement anticipée), l’indice de référence des valeurs technologiques a bondi de plus de 4% sur la seule séance du 27 juillet ! Comme souligné dans l’excellente newsletter quotidienne et matinale du site ZoneBourse, « chaque hausse de taux est censée rapprocher la Fed du moment où elle cessera de les relever ! »
Ajoutons surtout que le diable se cache parfois dans les détails… Si le message de Jerome Powell reste résolument favorable à de nouvelles hausses de taux dans les mois qui viennent, le basculement de la Fed d’une logique de durcissement rapide à un rythme plus graduel devient le scénario de référence de nombre d’investisseurs. Un scénario susceptible de reléguer le principe de « taux d’actualisation » décrit en préambule au second plan… au profit de la capacité des sociétés à délivrer de la croissance dans un contexte de ralentissement économique. Justement, que nous dit cette semaine la microéconomie sur ce point, alors que la saison des résultats d’entreprise bat son plein ?
Il est notamment intéressant de noter la capacité de certains mastodontes à continuer à croître à un rythme soutenu : Alphabet a ainsi affiché des revenus en nette croissance (+13%) tout en maintenant une marge opérationnelle à 28% ! Peut-être plus intéressant encore : il y a quelques semaines, ces petites déceptions (car les résultats en question restent légèrement en deçà des prévisions des analystes) sur des acteurs typés « croissance » auraient sans nul doute provoqué des dégagements massifs… Aujourd’hui, les actionnaires s’en satisfont pleinement (+5%). Signe d’une attractivité retrouvée et d’un scénario de politique monétaire plus ancré ? A suivre…
A l’opposé, certains acteurs confirment leur statut peu convoité de « victime des tensions inflationnistes »… Le géant de la distribution outre-Atlantique, Walmart, a ainsi émis un nouvel avertissement douloureux sur ses résultats du fait de l’inflation record et de la faible consommation. Signe supplémentaire que les sociétés fortes d’un pouvoir élevé de fixation des prix sont les mieux armées pour performer dans la phase de cycle actuel.

 

2/ Le TPI est-il mort-né ?
Il y a une semaine de ça, la Banque centrale européenne était attendue au tournant quant à sa capacité à passer à l’action (sur le front de l’inflation mais surtout sur la maîtrise des taux souverains). En annonçant jeudi dernier un relèvement de ses taux directeurs de 50 points de base, elle n’a finalement que légèrement surpris son auditoire (qui attendait davantage 25 points de base). Elle a surtout probablement déçu quant à la mise en place d’un nouvel outil de financement dédié aux pays en difficulté. En théorie, le « Transmission Protection Instrument » pourrait permettre à la BCE d’offrir des conditions de financement favorables aux pays dans le besoin… Seulement, les quatre critères énoncés pour être éligible à cet outil de protection ont jeté l’opprobre sur la volonté/capacité de l’institution à agir. Ne pas faire l’objet d’une procédure de déficit excessif, afficher une absence de déséquilibres macroéconomiques graves et une viabilité de la politique budgétaire sur le long terme, et enfin avoir mis en place des politiques macroéconomiques saines et durables… Lors de la dernière décennie, nombre de pays périphériques se sont appuyés sur le soutien direct ou indirect de la BCE en période de crise. Rares sont en revanche ceux qui remplissaient alors totalement les critères énoncés… Si l’on en juge par l’évolution du 10 ans italien depuis cette annonce, il reste un certain chemin à parcourir pour rassurer pleinement les opérateurs… Surtout, il est probable de voir une coalition eurosceptique (donc opposée aux réformes exigées dans le plan de la BCE) prendre le pouvoir de l’autre côté des Alpes. L’activation du TPI paraîtrait bien peu probable dans ce scénario… Le versement du plan de relance européen, dont l’Italie doit encore bénéficier (150 milliards d’euros, soit près de 7,6% du PIB, doivent encore être versés d’ici 2026), pourrait lui-même être menacé en cas de retour de la nouvelle coalition sur des réformes antérieures. En Italie aussi, l’été sera chaud…

 

Sources : WiseAM, Boursier, Capital, Le Monde, Investir Les Echos, Zone Bourse, Boursorama, BFM Business, Les Echos
Crédits images : Gettyimages
Achevé de rédiger le 28/07/2022