1/ « Leur monnaie… notre problème ? »
Si la hausse du dollar n’a au premier abord que peu d’impact sur un patrimoine européen, elle traduit en apparence la défiance croissante des intervenants à l’égard de la zone euro (et bien sûr du différentiel de taux). La monnaie commune n’est pour autant pas la seule à subir les foudres des opérateurs de marché, et des devises souvent surachetées en phase de crise telles que le yen subissent elles aussi des reculs marqués par rapport au dollar depuis le début de l’année. Il y a un demi-siècle, le secrétaire au Trésor de Richard Nixon, John Connally, jetait un pavé dans la marre des autres grandes économies en déclarant : « Le dollar est notre monnaie… mais votre problème ». Lorsque le billet vert est fort, cela génère un stress financier et économique dans le reste du monde. Cinquante ans après, le constat n’a jamais semblé autant d’actualité… La politique monétaire restrictive menée par la Fed a récemment ramené le dollar US sur des niveaux historiquement élevés face à l’ensemble des devises internationales. Surtout, sa dynamique récente traduit une force relative considérable des Etats-Unis par rapport au reste du monde occidental. Comme nous le rappelions la semaine passée, les Etats-Unis sont exportateurs nets de gaz naturel… et cela change (presque) tout. L’économie de l’Oncle Sam s’impose chaque jour un peu plus comme la grande gagnante de la crise actuelle, même si le durcissement monétaire menace outre-Atlantique aussi le potentiel de croissance. La maîtrise de l’inflation se joue surtout du côté de son marché de l’emploi toujours en zone de surchauffe (hausse des coûts salariaux, baisse de la productivité). Pour les autres, et notamment les pays importateurs net d’énergie, la chute des devises en cours revient à rajouter un effet inflationniste (et donc récessif) à un autre.
Faut-il pour autant acheter du dollar à 0,96 face à l’euro pour protéger son patrimoine alors que celui-ci se traitait encore à 1,21 il y a un peu plus d’un an ? La force relative des Etats-Unis a déjà été, au moins en partie, intégrée par les intervenants. L’investisseur européen peut toutefois se poser la question de diversifier son exposition aux devises pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier… politique. Comme le montre l’inflexion stratégique récente de l’Angleterre (intervention monétaire) ou du Japon (intervention sur le change), certaines zones économiques seront peut-être plus rapides et efficaces à l’heure d’enrayer la chute de leur devise. A suivre…

 

2/ A quand le rebond ?
Nul ne peut échapper au climat anxiogène actuel, que l’on s’intéresse à la presse financière… ou même que l’on survole la presse généraliste ! Maîtrise délicate des tensions inflationnistes, impacts indirects du durcissement monétaire (après l’ère de l’argent « gratuit » de la dernière décennie), risque de ralentissement économique, tensions géopolitiques croissantes… Il faut bien reconnaître que les pressions boursières (et l’aversion au risque des investisseurs) reposent sur des problématiques tangibles. Rappelons un élément important : le marché « anticipe » le plus souvent les dynamiques de l’économie réelle. Aussi, au même titre que la baisse des actifs « cycliques » précède le plus souvent le ralentissement du cycle économique… il y a de fortes chances que le rebond des actifs risqués se matérialise bien avant l’embellie de l’économie réelle.
Pour autant, la période de l’argent « gratuit » post-crise financière de 2008 a nourri une tendance haussière quasi généralisée. Il est probable que la période qui s’annonce, bien que propice à une reprise haussière des marchés, nécessitera dans un premier temps bien plus de sélectivité. Selon l’adage du « winner takes all », les flux des investisseurs finiront par revenir sur les marchés… mais probablement d’abord sur les actifs de qualité… notamment ceux capables de croître indépendamment du cycle économique. Ces mêmes actifs que les investisseurs avaient jeté avec l’eau du bain en début d’année.

 

3/ Une semaine encore bien volatile…
Les séances se suivent… et se ressemblent (malheureusement) sur les différentes places financières. Les indices européens, avec 10 baisses enregistrées sur 11 séances, subissent notamment les foudres des investisseurs. La psychologie de ces mêmes investisseurs semble tout de même avoir évolué… Largement concentrés sur l’ajustement monétaire en cours (vente des actifs croissance), ils semblent dernièrement bien plus préoccupés par le risque pesant sur le cycle économique (vente des valeurs cycliques). Comme nous l’évoquerons ensuite, les foudres des opérateurs ne s’abattent pas seulement sur les marchés actions… mais également sur les devises ! Derrière la hausse fulgurante du dollar se cache de nombreuses autres secousses, que l’on regarde du côté du dollar… ou encore de la livre sterling ou du yen. Le sabotage probable des gazoducs Nord Stream 1 et 2 a provoqué une flambée malvenue des prix du gaz… Il paraît désormais plus que probable que l’approvisionnement en provenance de la Russie soit proche de zéro ces prochains mois. Combiné aux référendums « remportés » par Moscou dans les zones contrôlées en Ukraine, la possibilité d’une nouvelle escalade des sanctions se renforce… et par la même occasion l’aversion au risque sur les marchés financiers.

 

Sources : WiseAM, Le Figaro, Les Echos, BFMTV, Courrier International, Capital, Boursorama, Actualités Orange, Le Monde, Bourse Direct, Zone Bourse
Crédits images : Gettyimages
Achevé de rédiger le 29/09/2022